S'il existe une menace sérieuse à l'Anti-Management, c'est bien la créativité. Ce concept abject qui permet à votre équipe d'avoir des idées qui ne viennent pas de vous, de penser d'autres manières de faire que la vôtre ou même d'imaginer une autre existence que celle que vous lui faites vivre. Cette créativité doit être systématiquement et âprement combattue par un bon anti-manager. Nous avons donc décidé de vous livrer quelques principes pour vous y aider.
La première grande recommandation de l'anti-management pour tuer la créavitié est de mettre en place un environnement et une équipe d'un conformisme à toute épreuve. Voici quelques pratiques avérées pour y parvenir.
1. Entourez
vous de clônes conditionnés
Le premier ennemi à abattre pour éviter toute
créativité est bien entendu la diversité. Commencez par le plus évident, votre équipe.
Il est important lors du recrutement que vous vous assuriez
qu’ils aient tous le même bagage culturel et intellectuel, afin qu’ils pensent
exactement la même chose…que vous. On recommande pour la France des jeunes d’un
milieu plutôt aisé (qu’ils n’aient pas connu de difficulté est souvent gage de
moindre créativité), bons élèves, qui ont fait une grande école, votent au
centre (pas de convictions), sont de tendance catholique (mais pas fervents), de
culture bien Française sur plusieurs générations (pas de vie à l’étranger), et
évidemment de même sexe et de même orientation. L’anti-management recommande de
privilégier les hommes, cela favorise la compétition. Evitez les régions aux
cultures trop fortes et extraverties comme le Pays Basque, ou la Provence qui
pourraient avoir envie de montrer d’autres façons de parler que la vôtre,
préférez la région Parisienne et plutôt l’Ouest. Fuyez comme la peste les parcours originaux,
les entrepreneurs ou artistes en tout genre.
Pour vous assurer une plus grande uniformité de pensée et d’action
et les lobotomiser rapidement, recrutez autant que possible des jeunes qui soient
déjà bien conditionnés à rechercher la reconnaissance et la réussite. Les
fameux « underconfident-overachiever », parfaits petits soldats prêts
à bien s’aligner. D'un point de vue pratique, il est clair que vous serez le/la seul(e) abilité à trier les CVs, déterminer les critères (totalement subjectifs) de recrutement, et décider de qui a le privilège de rejoindre votre équipe. Un peu de mauvaise foi peut aider à faire passer certains choix qui pourraient sembler trop arbitraires: "Malgré son CV brillant il a été très mal à l'aise pendant l'entretien, il est donc incapable de tenir le stress, on ne le prend pas".
Si, hélas, pour des histoires de quotas ou autre erreur de
recrutement, il arrive qu’on vous impose de travailler avec un collaborateur
qui ne soit pas vôtre clone, rendez lui la vie impossible (cf articles « Comment
tuer votre équipe en 10 Leçons » et virez le dès que possible.
2. Enfermez-les
dans un grand nombre de règles strictes
Prenez le temps de formater vos équipes pendant quelques
mois en leur imposant un cadre de pensée et des méthodes de travail aussi
strictes que précises. Leurs schémas de raisonnement doivent devenir
parfaitement identiques. Nous recommandons l’ouvrage du « Pyramid
Principle » de Barbara Minto ou autres ouvrages aux nombreux « framework »
permettant de bien enfermer leurs pensées dans un cadre uniforme. Leurs outils de travail doivent également être
des cases pré-fabriquées qu’ils n’ont qu’à remplir scrupuleusement et
scientifiquement avec les informations récoltées. Allez jusqu’à minuter leur
tâches, surveiller leurs déplacements et leur imposer des horaires extrêmement précis. Il va de soi que vous leur imposez aussi un dresscode. Nous suggérons
le port d’un costume noir avec une fine cravate noire, avec une marge d’acceptation
d’une chemise bleu pâle sur un pantalon noir le vendredi. Pas de jupes ni de
talons hauts pour les femmes si il y en a. Inspirez vous de l'armée (Impériale en particulier) pour ce volet là, les grades et distinctions en moins évidemment. .
Vos collaborateurs doivent ainsi devenir parfaitement
interchangeables, et comprendre qu’ils ne sont qu’un être vivant jetable
remplissant un poste bien plus important qu’eux, une sorte de robot intelligent
(que les anti-managers ont tous hâte que la science développe, cela nous évitera
des prudhommes) dont le rôle consiste à tout sauf à produire des idées qui sortent
des cases à remplir.
3. Créez un environnement de travail parfaitement aseptisé
Ensuite, pour vous assurer que ces idées n’auront pas lieu
de germer faute d’arrosage, assurez-vous également de maintenir un
environnement de travail aussi impersonnel, froid et aseptisé que possible, où
la seule différence d’un bureau ou « cubicle » à l’autre sera le nom
sur la petite plaque de la porte. L’environnement idéal pour cela est composé d’un
grand plateau bordé de longs couloirs parallèles aux bureaux identiques
entourant un open space en « grille » où chacun est enfermé dans la
même petite boite au mobilier identique.
Le tout dans une grande tour d’acier et de verre, dans des étages suffisamment
haut pour qu’il n’y ait vu que sur le ciel ou d’autres tours, avec des couleurs
dans des tons gris que l'on retrouve partout, de la moquette aux parois, une luminosité artificielle
blafarde et l’absence totale de décoration ou autre plantes, stupide suggestion
néo-écolo qui ne fait que distraire le regard, avec le risque non-négligeable
de provoquer la naissance d’une idée.
Même si cela ne suffit pas à tuer toute forme de créativité
comme nous le verrons dans les prochaines leçons d’anti-management, vous aurez
ainsi l’assurance d’un cadre et d’une équipe aussi stérile que possible en idées. Car les idées, il n'y a que vous, l'anti-manager, qui devez en avoir. Votre équipe devra vite le savoir.